dimanche 28 avril 2013

Being a Munsterman

I am Irish. Born in Limerick, but living in Paris. Work for a bank from Monday to Friday. But when saturday comes... I'm a Munsterman. A Proud Member of the Red Army. The Justified and Ancient, Unbeatable Red Army. So thought I...
A few weeks ago, I decided to come down on my own to Montpellier to see my favourite playing against that famous French team which is said to be able to beat Les Bleus... The harder they come... I struggled to get some tickets for the game, but finally found one : right in the middle of the Yellow Army fans stand. Surrounded but not sunk, I was meant to be a red partisan in a yellow but not mellow ocean...
Drove down to Montpellier, rather than going by TGV. Don't know why. Maybe I wanted to meet L'Auvergne before the match, see where those fantastic fans were living and check if the volcanoes were really asleep... I was not disappointed : I will always remember my journey through the Col de la Fageole. I could not imagine it could be so snowy in the so-called "French enchanted April"... I eventually found my way through the blizzard... But most striking was that long and unfinished blue and yellow motor snake which winded from Clermont until Montpellier. For sure, I was on the track. For sure, the afternoon would not be a picnic on the pitch for Paul and his team mates...
Registered in the hotel, then headed to the stadium. Proudly wearing my red jersey, I must admit I was not so confident, alone in the yellow tide... But I felt reassured when some happy, friendly and joking French faces came to me to offer me a beer - French I was afraid, but always good to have... We began to talk : the few French I took vis à vis the worst English I ever heard in the world...
"Munster ! Good ! Good ! Red Army ! Good game ! Good !" they kept on saying, with the smiling face of the too-early-in-the-afternoon drunkeness... I did my best to reply "Merci beaucoup ! Santé !" but I was quickly separated from my new friends, in the search of my seat in the Canigou stand.
Once again, I was not disappointed : if you saw a little red spot in the middle of a yellow field, that was probably me... What an atmosphere ! I could not hear myself shouting during the game ! I was deaf after the end of it !
Indeed that was a huge game. It was a test match intensity down on the pitch, no wonder ! First half scared me : we were promised hell, and that was it... No ball, no scrum, no line out... A machine was walking on our side and no one could stop it... I was even happy to be only ten points below at half-time. Could have been worse...
Anyway, I felt more and more comfortable : the stadium was smelling beer. I took advantage of the break to look for a buvette. There, I found a lot of Yellow Army Fans in lively discussions about the game. I fraternized with some decent chaps speaking a better English. We spoke about that incredible blind-side flanker, jumping on every ruck, named Bardy. A Portuguese guy, they told me. I thought they were making fun of me, but, indeed, he was Portuguese... What a warrior, I said... We drank and spoke for a while. From that moment on, my memory is not so sharp it should have been...
I only remember that when I was back in the stand, the second half had begun a few minutes ago... The Reds were attacking in the Clermont side and suddenly, the thunder stroke from ROG. Yeeeaaaaahhhhh ! And the conversion ! Six below and twenty minutes to go ! Come on Munster ! That was a game changer and everything was set up for a nail-biting climax... I thought it was done when Nalaga got muddled up on his line. But then again, no... I was furious against Nigel Owens when he whistled that forward pass in the last minute. And then it was over... Incredible atmosphere : those guys were shouting, jumping, singing La Marseillaise, dancing, even crying, everywhere... For sure, they deserved their win and their joy. I was absolutely gutted, but forced to admit our defeat. And very proud of my team : they struggled until the end and never surrendered... I congratulated my French neighbours who told me several times "Sorry good game". I don't know why they all keep on telling the same line...
I staid a little while in the stand, waiting for the team to salute the fabulous Red Army, which had merrily come along from this marvellous Erin Shore I miss sometimes in the French capital... All these fighters, Paul, Keith, James, Casey, Conor, Ronan... Well done, boys, see you next year for the strike back of the Red Empire... I almost cried when I saw ROG saying good byes with his son in his arms... I don't know why, but when I saw him, I had in mind that silly Top Gun song from the Righteous Brothers You've lost that loving feeling...
Fuck ! I love you Ronan ! I love that team ! I love that game ! I even love you, you French Bastards, with your fucking great team and fucking great supporters !
Merci pour tout, les Auvergnats. Les Munstermen vous saluent, vous souhaitent bonne chance et vous disent à l'année prochaine pour la revanche !

jeudi 25 avril 2013

Complaisance

Le petit matin blême. Je regagne ma garçonnière, seul et titubant, triturant la clé à la recherche d'une serrure revêche. La porte est ouverte. Bof... J'ai du oublier de la fermer en partant... J'entre. Je n'ai qu'une envie, m'allonger dans mon lit king size à baldaquin, tirer la moustiquaire et dormir du sommeil de l'ivrogne.
Je vois une ombre assise dans le canapé.
- C'est toi, Brock ?
Pas de réponse. J'avance d'un pas chaloupé, échappant, tel Wesley Fofana dans la défense anglaise, aux plaquages de la table basse et du fauteuil club.
Ce n'est pas Brock. Brock avait encore des cheveux la dernière fois qu'il est venu ici. Je suis ivre, mais pas encore assez...
Je m'approche : P... Vern ! Il est vrai que je lui ai donné les clés.
- C'est à cette heure-ci que tu rentres ?
Je respire péniblement, réprimant une nausée, et prends appui sur l'accoudoir du canapé.
- Vern, qu'est-ce que tu fais ici ?
Je m'affale dans le fauteuil qui lui fait face. Dans la pénombre, sur la table basse, je devine le cimetière de pizzas, de bouteilles de bières et de paquets de chips éventrés que j'ai consciencieusement alimenté depuis plusieurs jours. Ce spectacle peu ragoutant me fait penser à la défense du Stade Français et la nausée me reprend : j'ai le vertige.
- Regarde moi dans quel état tu t'es mis... Et regarde moi le bordel dans cet appartement... Tu espères ramener quelqu'un comme ça ?
- Justement, répliqué-je dans un accès d'humeur : c'est ma meilleure défense. Jamais je n'oserai inviter une personne convenable dans ce capharnaüm digne du projet de vie collective du Racing. Ainsi, je suis sûr de ne pas fauter.
Satisfait de ma réponse, je cherche ses yeux perçants dans le noir. Il ne bronche pas, immobile. Je déteste lorsqu'il est comme ça. Je sens sa colère froide comme la soupe chinoise qui trempe dans le bol qui repose sur la table entre nous deux. Enfin, il se décide à attaquer :
- A quoi tu joues ? Cela fait plus d'un mois que tu n'as rien sorti. Je viens pour prendre de tes nouvelles, et je vois que tu te laisses aller... Complètement...
Je m'empare de la télécommande qui était cachée sous une feuille de papier vierge : le "Plan stratégique 2015" du XV de France, que je m'étais procuré à grand frais grâce à Richard Escot. J'allume la télé : j'étais resté sur une chaîne bolliwoodienne. J'aime le cinéma indien, c'est reposant : il y a des méchants tricheurs, des gentils méritants, et, à la fin, après bien des péripéties, les gentils gagnent, les méchants se repentent et la morale est sauve. La plupart du temps, on pleure de joie. Tout le contraire du sport professionnel...
- Avec tout le respect que je te dois, Vern, tu m'emmerdes. Je suis comme Sella à Agen : je ne sais pas quoi faire, je suis bloqué. Il n'y a plus rien qui sort...
Je contemple la belle héroïne à la peau mate et au nez légèrement aquilin. Le visage de Vern est éclairé à moitié par la lumière diffuse provenant de l'écran. Il n'a toujours pas sourcillé. Je poursuis :
- J'ai beau y penser tous les jours, rien... Même le MIDOL ne me fait plus réagir... Mourad et Bernard m'indiffèrent... Paul O'Connel me fait l'effet d'un joyeux drille... Salviac me manque... J'ai perdu toute velléité sarcastique. Je n'ai plus de fiel... J'ai le sens de l'humour d'un Mormon neurasthénique... Et tout cela, c'est ta faute !
J'observe Vern du coin de l’œil, tout en essayant de comprendre pourquoi la Belle a poussé du balcon le Gentil et non pas le Méchant. L'argent, certainement... Mon Divin Chauve paraît surpris, lui aussi. J'embraye :
- Et oui ! Figure-toi que j'ai été élevé dans les travées d'un Stade Marcel Michelin que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître... On y voyait des équipes comme Aire-sur-Adour ou Mazamet ! Alors contempler Sivivatu faire une passe après contact dans l'intervalle à Regan King, ben moi, ça me fait chialer de bonheur... Et surtout, ça me laisse coi. Tous les week ends, je pleure ! Et le lundi, quand je me demande ce que je vais bien pouvoir raconter pour faire ricaner trois pékins qui s'ennuient au bureau, eh bien, je flanche : je vois Mike Delany et je souris comme un adolescent en chaleur... Tout le monde nous encense. On pratique l'un des plus beaux rugby jamais joué en France et en plus, on gagne... Que veux-tu que je rajoute à cela ? Donc, pour compenser cet excès de plénitude, je glande devant la télé, je bouffe des plats à emporter, je sors et je picole... Avant, je pouvais compter sur l'ASM pour instiller une nuance d'inachevé et de déception dans ma vie... Aujourd'hui, je dois trouver un nouvel exutoire à ma déprime et mon insatisfaction...
Vern soupire. Il se lève, s'empare de la télécommande, éteint le téléviseur, au moment même où le bon flic original et sa plantureuse assistante ingénue commençaient à cuisiner le couple diabolique.
- J'aurais préféré une séance vidéo de meilleure facture, lance-t-il.
De nouveau le silence. Je cherche sur la table une canette de bière encore consommable. J'en trouve une que je porte à ma bouche. Je grimace et je recrache aussitôt le liquide tiède souillé par la cendre d'un mégot... Vern m'observe avec commisération. Indigné, je reprends :
- Et puis, je suis comme l'équipe : moi aussi, contrairement aux apparences, je grandis ! Et je ne veux  plus de billets faciles qui vont flatter mon lectorat.
Vern soupire à nouveau.
- Et ton livre, ça en est où ?
Les coups bas, maintenant...
- Il est prêt, enfin presque... J'attends que tu aies réalisé le doublé : la période sera plus propice à la vente...
Je soutiens son regard, avec une moue avinée que j'espère provocatrice, mais qui ne doit être que pathétique. Vern se lève, se dirige vers la porte, se retourne vers moi avant de l'ouvrir :
- Pour ta gouverne, réaliser le doublé, cela demande de l'opiniâtreté, de la précision, de la chance, du talent, et surtout, beaucoup de travail. Lorsque tu auras fini de procrastiner, on pourra en reparler...
Là-dessus, il sort et ferme la porte sans bruit.
Je me retrouve seul avec mes cadavres peu exquis. J'ai dessaoulé plus rapidement que prévu, je n'ai plus sommeil.
J'allume mon ordinateur, et, dans le petit jour, je tente une relance de l'en-but.