mercredi 6 juin 2012

Une demie, s'il vous plaît !

Psy 
J'entre dans le cabinet médical. Une secrétaire m'avise depuis son comptoir :
- M. Cotter ? Le professeur Cleese va bientôt vous recevoir. Je vous prie de vous installer quelques instants.
Je suis le premier. Je m'assois sur un canapé confortable Bauhaus et je trie les revues sur la table basse assortie : MIDOL MAG, Rugby Attitude, Philosophie Magazine, La Revue des Farces & Attrapes et d'autres publications de référence en matière de rugby... Finalement, j'opte pour la Semaine du Charcutier, qui demeure une lecture indispensable pour tout connaisseur du Top 14. Je lis mon horoscope : "Bélier ascendant Taureau - Travail : vous gâchez de la bonne chair à saucisse et tout se termine en eau de boudin, même pas de quoi faire une bonne farce - Santé : de menues contrariétés vous font pédaler dans le pâté - Amour : l'être aimé des antipodes vous revient, attention toutefois à ne pas abuser des viandes exotiques". Je regarde la date : juin 2012 - Pas mal...
Puis la secrétaire m'interpelle :
- M. Cotter ? Le professeur Cleese va vous recevoir.
Une porte s'entrouvre, et un homme d'âge mûr en blouse blanche m'accueille avec un grand sourire.
- M. Cotter ! Soyez le bienvenu. Ma secrétaire m'a indiqué que vous souhaitiez un rendez-vous en urgence à la Clinique du rugby. Cela fait longtemps qu'on ne vous a pas vu ici. La dernière fois, cela devait être... (il fait mine de réfléchir) en 2008, je crois... Vous aviez fait appel à nos psychologues...
Un peu que je m'en souviens. Davit avait fait un transfert, était tombé amoureux du psy et il avait fallu exfiltrer ce dernier avant que l'irréparable ne se produise.
- Bien, asseyez-vous, je vous en prie, que puis-je faire pour vous ?
Je me cale dans le fauteuil Le Corbusier et je commence mon explication, du moins j'essaie :
- Voila, docteur, j'ai un problème...
Je reste bouche bée, plus rien ne veut sortir. Je tente de me reprendre :
- Je n'arrive pas à...
Impossible de prononcer la suite. Le médecin vient à mon secours :
- ... à terminer les phrases ?
- Oui, exactement, et même je ne parviens pas à...
- ... tout simplement achever tout ce que vous débutez ?
Je hoche la tête, vaincu...
- Je vois... Hum ! C'est un mal peu commun. En quelque sorte, vous faites les choses... "à demi".
- Oui !!! Ou plutôt, "en demi".
- Et cela remonte à quand ?
Je pris ma respiration et lançais d'un trait :
- Printemps 2011.
- Et avant, pas de signes précurseurs ?
- Si, mais moins prononcés, j'arrivais...
Une nouvelle fois bloqué...
- à aller au bout de phrases finales ?
- C'est ça !
- Bien, je vais vous ausculter, mais je crois que vous souffrez en fait de la "maladie de Labit de Travers".
- Pardon ?
- Oui, c'est contagieux. Vous êtes allés dans le sud-ouest récemment ?
- A deux reprises pour...
- Ne me dites rien, j'ai compris. Je pense que vous avez été exposé, et maintenant, vous faites tout à moitié, ou plutôt, vous vous arrêtez toujours à demi-mot ou à mi-chemin. Cette maladie est également très répandue en Écosse. Certains de mes confrères appellent cela le "syndrome de Dusse" : vous n'arrivez plus à conclure.
- Mon Dieu, mais que vais-je...
- Devenir ? (J'opinai d'un air avide) Ça se soigne... Avec de l'argent, du travail et une solide rééducation psychologique. En attendant, je vous prescris du repos, un bon mois sans stress ni émotion.
- Pourrais-je tout de même regarder...
- La finale du Top 14 ? Hum ! Je vous le déconseille... Vous pourriez attraper une "grippe de Northampton"...
- ?
Il me lance un regard empli de commisération :
- Éternels regrets...
- Ah !..
- Bien M. Cotter, il ne me reste qu'à vous saluer. Je vous fais une ordonnance pour la série de 47 coups de pieds réussis de Brock James et l'intégrale des essais de Nalaga. Matin, midi et soir.
- Au revoir...
- Oui, je sais, "docteur"...

Je me retrouvais, un peu con, dans la salle d'attente. Quelle ne fut pas ma surprise de croiser Maître Guy, venu consulter lui aussi. Nous nous saluâmes, gênés :
- Ça va, Guy ?
- Ça va, Vern ?
- La saison a été longue...
- J'ai l'impression qu'elles sont plus longues chaque année...
Lorsqu'il fut entré dans le bureau du médecin, la secrétaire me lança, en confidence :
- C'est Monsieur Novès... C'est un patient régulier... Il voit doublon...

PS : et merci de répondre à mon sondage :
http://www.facebook.com/questions/405907976114827/
ou
http://www.cybervulcans.net/forum/index.php?showtopic=51683&st=0

4 commentaires:

  1. excellent ! en revanche je n'ai pas compris la "grippe de northampton" ...

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  2. ah oui, mais celle là on l'a deja eu ...
    merci !

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  3. au niveau français en tout cas, en espérant que ca nous protège contre cette méchante grippe !

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